Quand il s’agit de regarder dans le rétroviseur, Stéphanie se dit qu’embrasser le métier de comédienne n’était pas vraiment gagné d’avance : « pour mes parents, artiste ce n’était pas un métier. J’ai grandi avec cette idée en tête sans me poser plus de questions ». Pourtant, aussi loin qu’elle se souvienne le désir de théâtre était présent depuis l’enfance : « Je me mettais souvent en scène devant ma famille. C’était mon premier public. Je prenais vraiment beaucoup de plaisir. » Dès le collège, elle prend ses premiers cours de comédie et découvre les joies de la scène. Ce plaisir elle va y goûter a nouveau lors de son entrée à la faculté.
Des bancs de la fac aux planches de la scène.
Bibliothécaire, une passion ? Obtenir un diplôme dans l’espoir de pouvoir exercer un bon métier est un schéma pour le moins traditionnel. Sans grande conviction mais avec assiduité elle prépare une maîtrise d’anglais qu’elle obtiendra brillamment. Malgré tout, ce qu’elle retient de son passage étudiant, c’est la découverte cette année là de l’improvisation théâtrale à la fac de lettre Saint-Quentin-en-Yvelines. « J’ai vécu des moments inoubliables. En 92, j’ai rejoint l’équipe d’impro de la fac et j’ai eu le plaisir de commencer ma formation aux côté d’Emmanuel Urbanet ou encore d’Arnaud Joyet », raconte t’elle le sourire aux lèvres. Cette expérience donnera encore un peu plus d’épaisseur à son envie de scène. Mais la réalité de la vie la rattrape bien vite. Son diplôme en poche il faut maintenant s’orienter. Elle pense à devenir prof d’anglais mais se dit très vite que le système de l’éducation nationale ne lui conviendra pas. Passionné de culture, en particulier de littérature, une idée s’impose à elle : devenir bibliothécaire.
De formation en formation
Son niveau lui permet de passer directement le concours de catégorie A, pour briguer un poste de direction dans les métiers du livre. Cette première tentative n’est malheureusement pas couronnée de succès. Elle se rappelle alors : « Je suis une obstinée. Il n’était pas question d’abandonner. Je me suis inscrit à Toulouse dans un IUP Archive et médiathèque pour obtenir une licence. Ça devait me permettre d’étoffer mon bagage pour trouver du travail plus facilement »
Durant ces études elle retente, cette fois avec succès, le concours territorial. Alors qu’elle n’a pas encore décrocher son premier emploi, elle se remémore cet instant ou le temps à sembler se suspendre : « J’ai décroché mon concours au beau milieu de mon année de licence. Comme je souhaite toujours aller au bout de ce que j’entreprends j’ai continué ma formation en attendant de décrocher mon 1er emploi. J’étais en stage à la galerie du château d’eau, pôle photographique reconnu situé à Toulouse, lorsque qu’une pensée m’est tombée du ciel. Je me suis figée et je me suis dit qu’en fait je n’avais jamais voulu être bibliothécaire ».
Cette fois c’est sûr, le théâtre doit faire partie intégrante de sa vie. Il est hors de question de jeter un voile sur ses désirs de jeunesse. « Je retrouve une note que j’avais écrite dans un petit carnet à la manière d’une To do list qui disait : Je veux raconter des histoires, faire rêver les gens…Rêver moi même ».
Je veux raconter des histoires, faire rêver les gens…Rêver moi même
Vers sa première expérience professionnelle
Maintenant ce rêve doit prendre forme. Sans négliger ses envies artistiques, elle assure d’abord sa vie quotidienne et devient tour à tour, directrice-adjointe à la bibliothèque municipale de Castres puis directrice d’une médiathèque en périphérie de Toulouse au début des années 2000. C’est dans la ville rose qu’elle intègre des ateliers de théâtre classique dans lesquels son investissement sera total. Là-bas elle tisse des liens avec des comédiens qui vont la motiver et la conforter dans ses choix futurs. Malgré son départ vers Bordeaux quelques temps plus tard elle continue de suivre ses ateliers à Toulouse tout les lundi soir pendant deux ans. Sa passion est dévorante, l’envie trop forte se souvient-elle : « En 2006, je quitte la Médiathèque de Bordeaux que j’avais rejoins après mon départ de Haute-Garonne, pour effectuer un bilan de compétence ».
Le format est proposé aux écoles, aux médiathèques et rencontre un succès certain. Les contrats sont là et les formats se multiplient. « Il est toutefois difficile d’en vivre confortablement » : avoue Stéphanie. Elle réintègre la médiathèque de bordeaux pour la sécurité financière mais peu importe pour elle. La machine est lancée, les projets de plus en plus stimulants. Elle mène toutes ses activités de front et en développe de nouvelles. Elle retrouve l’improvisation en 2008 et rencontre celui qui deviendra le père de ses enfants la même année.
Du théâtre pour aider le autres
Le nouveau moment clé de sa carrière intervient également en 2008, alors qu’elle se ballade dans les rues de bordeaux. Elle passe devant le bureau des Clowns stéthoscopes. Cette association opère en milieu médical en envoyant des clowns de théâtre au chevet des enfants malades pour leur faire oublier le temps d’une rencontre leur quotidien difficile. Cette initiative cristallise toutes les valeurs qu’elle souhaite véhiculer depuis toujours. Malgré tout, la route qui va la mener à endosser ce costume ne sera pas simple.
« Ils n’engagent que des professionnels. J’enchaine alors les stages pour développer ma formation. Je dois construire un clown solide pour pouvoir affronter le quotidien de l’hôpital. Le clown est dans le lâcher prise mais le comédien de ce qu’il fait et dans quel environnement il le fait ».
Pendant quatre ans elle se rapproche petit à petit de l’association, d’abord en tant que bénévole, au maquillage ou à la confection de paquets cadeaux à l’attention des enfants. Les pièces du puzzle se mettent tranquillement en place. Puis en 2014, elle est titularisée au sein de l’institution et reçoit par la même occasion son premier cachet en tant que clown professionnel.
La consécration
Une ribambelle de projet plus tard, une chose est sûre, elle peut enfin vivre de la passion qui animait les rêves de la petite fille, de l’adolescente et de la jeune adulte qu’elle n’a jamais cessé d’être. Le 01 mars 2016 marque légalement le début de son nouveau statut de saltimbanque. C’est tout sourire qu’elle clôture notre entretien en déclarant : « Mes différentes activités théâtrales, mes projets personnels et le Clown me permettent enfin de vivre de mon métier ».
Elle se consacre maintenant à transmettre ses connaissances à travers des ateliers et des formations à l’attention de tout public. Une façon pour elle de boucler la boucle en quelque sorte, de rendre ce qu’on lui a donné. Si on peut dire que le parcours de Stéphanie n’est pas un long fleuve tranquille, on peut féliciter son incroyable ténacité à empêcher le conformisme ambiant de la vie :
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